23 octobre 2006
1
23
/10
/octobre
/2006
12:40
Éditions Gallimard, Rentrée Littéraire 2006, 356 pages.
Prix Georges-Brassens 2006
Dans un immeuble très chic, au 7 rue de Grenelle, se croise le destin de deux personnes atypiques.
Il y a d’abord Renée Michel, cinquante-quatre ans, la gardienne de l’immeuble qui est à ce poste depuis 27 ans et qui s’évertue à porter la parfaite panoplie de la concierge de peur d’être démasquée, (gros chat qui somnole sur des coussins recouverts de taies au crochet, télévision qui reste allumée toute la journée, filet à provision ou dépasse les fanes de carotte et le papier rose du boucher…). Renée à une passion secrète c’est une autodidacte qui adore les livres, l’art, la science, c’est un véritable puits de culture qui se cache des habitants en prenant l’air ignare, car elle ne veut pas faire des histoires en bouleversant par son savoir les stéréotypes et les idées reçues.
Au cinquième étage de l’immeuble dans un appartement de quatre cents mètres carrés vit Paloma Josse, une petite fille de douze ans, qui a une intelligence aussi grande que la fortune de son père député. Cette petite fille très particulière aime s’enfermer dans sa chambre pour s’abstraire de cette famille qu’elle trouve désolante. Entre une sœur Colombe qui l’insupporte et une mère qui n’a pour seule distraction l’arrosage de ses plantes vertes, Pamola décide, afin de les faire réagir, de mettre le feu à l’appartement avant d’aller se suicider, le jour de ses 13 ans, chez sa grand-mère avec les barbituriques de sa mère. En attendant la date fatidique elle a pour objectif de faire quelque chose d’utile de ses quelques jours qui lui restent à vivre, elle note dans un journal ses pensées profondes.
Mais l’arrivée de Mr Kakuro Ozu, riche japonais s’installant au quatrième étage, va bouleverser l’existence de Paloma, adoratrice de mangas, et de Renée effrayée et attendrie de voir son producteur fétiche prendre possession des lieux.
Pour ce deuxième roman, Mureil Barbery, nous offre un vrai bonheur de lecture, même si j’avoue parfois mettre sentie perdue dans les réflexions très psychologiques de la concierge, je me suis régalée dans ce roman profond mais léger en passant du rire et en le terminant avec les larmes aux yeux.
Extrait :
« Mme Michel, elle a l’élégance du hérisson : à l’extérieur, elle est bardée de piquants, une vraie forteresse, mais j’ai l’intuition qu’à l’intérieur, elle est aussi simplement raffinée que les hérissons, qui sont des petites bêtes faussement indolentes, farouchement solitaires et terriblement élégantes. »
Le blog de Muriel Barbery
Citation :
« L’intelligence est caractérisée par une incompréhension naturelle de la vie. » Henri BERGSON (1859-1941)
Publié par Florinette
21 octobre 2006
6
21
/10
/octobre
/2006
14:24
Photo : © P. Swirc
Éditions Grasset, Août 2006, 276 pages.
Au funérarium du Père-Lachaise, c’est l’enterrement d’Anna Tonnerre. Ses enfants, Laurence, Bertrand et Jérôme attendent la fin de l’incinération pour déposer l’urne au columbarium. Jérôme est nerveux, car il doit leur révéler les dernières volontés écrites de leur mère qu’elle lui a adressée sur son lit de mort avant de s’éteindre : « Je veux être incinérée », jusqu’à là pas de problème, mais Jérôme leur lit la suite « …et mes cendres jetées dans l’Atlantique Sud. », sans aucune autre explication. À partir de là tout se complique. Mais où est-ce donc l’Atlantique Sud, c’est très vague comme destination ?
Laurence et Bertrand décident d’un commun accord de laisser Jérôme, le dépositaire du testament, s’occuper du largage des cendres. Mais il ne s’est pas comment il va procéder et se trouve bien embarrassé par le pot aux cendres de sa mère, lui, ce grand rêveur des voyages au long cours n’est qu’un velléitaire névrosé. Rien que le fait de s’éloigner de son quartier lui déclenche une vraie crise de panique (troubles intestinaux, céphalées entêtantes...). Arrivera-t-il à surmonter sa phobie ?
Après avoir tourné autour du pot, ce passionné des mots et de palindromes cherche à comprendre avant tout le pourquoi de cette destination finale en farfouillant dans les affaires de sa mère restées dans l’appartement familial.
À force de remuer le passé, il découvrira le pot au rose d’une femme qu’il ne connaissait guère et confiera ses craintes et ses découvertes à un psychanalyste. À travers la mort de sa mère, c’est sa mémoire qui se ravive et son passé qui s’éclaircit.
C’est un roman plein d’humour et de tendresse, c’est plein de jeux de mots, de références à certains personnages et chansons. Et c’est très encourageant pour la suite puisque c’est son premier roman !
Citation :
« Partir c’est mourir un peu, mais mourir c’est partir beaucoup. » Alphonse ALLAIS (1855-1905)
Publié par Florinette
19 octobre 2006
4
19
/10
/octobre
/2006
13:47
Éditions Viviane Hamy, Rentrée Littéraire 2006, 267 pages.
C’est en regardant les photos de son arrière grand-père Lambert, garde-chasse au château des Perrières, que le narrateur nous fait entrer dans son histoire. Un bond dans le passé, dans l’ouest profond du XIXe siècle, au fin fond de la France sur les terres brumeuse et austère du vieux baron de l’Aubépine qui vient de mourir en laissant le domaine à son unique héritier ; son fils. Ce dernier, longtemps humilié par un père tyrannique, reprend possession des lieux après quinze ans d’absence.
Lambert qui incarne la rigueur et la moralité voit d’un mauvais œil ce jeune baronnet prendre la place de son ancien maître, surtout quand il s’aperçoit très vite que sa conduite n’est pas digne de son rang. Il multiplie les gestes déplacés et adore inviter des demi-mondaines pour les voir courir nues dans les couloirs sombres et déserts de son château, les suivant jusqu’à l’essoufflement un rasoir à la main. Car ce jeune baron de l’Aubépine aime se faire raser de près par ses demoiselles - du menton aux doigts de pieds - et surtout il s’enflamme, s’exalte à lacérer leur dessous. Tout cela au grand désespoir des domestiques Lambert et de sa femme Eugénie.
Et puis plein de faits étranges viendront pimenter ce roman ; les disparitions. En premier celle de Cachan, le valet de pied du baron, un homme sadique qui aime harceler Eugénie, suivit de la pétulante parisienne Berthe François ramenée par le fiévreux baronnet.
Les obsessions délirantes de ce châtelain qui s’enfonce progressivement dans la folie, en inondant de ses lettres excessivement admiratives Victor Hugo exilé à Guernesey, vont se renforcer. Magdeleine, la fille de Lambert, devient l’objet des convoitises de ce troublant baron. Dès lors, c’est une lutte de pouvoir qui s’installe entre le baron et Lambert, l’un terrifié par les chiens, l’autre par les mœurs, ils s’épient, s’affrontent jusqu’au drame en emportant dans leur sillage la belle Magdeleine.
C’est un huit clos étouffant, déstabilisant, mais terriblement envoûtant. Le lecteur comme les personnages ne sortent pas indemnes de ce roman à l’intrigue glaçante portée par une écriture brillante.
Citation :
« La folie, c’est la mort avec des veines chaudes. » Xavier FORNERET (1809-1884)
Publié par Florinette
17 octobre 2006
2
17
/10
/octobre
/2006
11:01
Éditions Denoël, Rentrée Littéraire 2006, 209 pages.
Présent ? est un excellent roman qui nous dévoile le monde scolaire comme un microcosme dans lequel se trouve le point de départ de l’enseignement, du savoir où l’avenir de chaque élèves se dessine.
Jeanne Benameur a su, par son expérience dans les établissements dit « difficile », se mettre dans la peau des personnages avec beaucoup d’émotion, d’empathie et de lucidité.
C’est un collège de banlieue comme tant d’autres où se croisent les destins d’adultes et d’adolescents. Tous les acteurs du collège sont mis en scène ; Principale, enseignants, conseiller d’orientation, parents, femmes de ménage, factotum, documentaliste, élèves ; tous sont embarqués dans cette aventure scolaire d’une réalité plombée par l’absence de perspectives.
C’est un véritable concentré d’humanité libérant son lot de peurs d’espoirs, de drame et d’échecs, mais la foi de certains, leurs initiatives individuelles parviennent à ouvrir les portes vers un avenir meilleur… Il y a aussi une vraie réflexion sur les émeutes de banlieue avec ses images de voitures calcinées.
J’ai beaucoup aimé cette vie de collège sous la forme d’un roman. C’est un livre passionnant où à il y a aussi la place pour une belle histoire d’amour entre Madison et Laurent. Le portrait de la documentaliste m’a également émue, cette jeune femme qui se dévoue corps et âme pour ses élèves afin de les diriger vers le plaisir de la lecture et ce professeur de lettres qui, après une lecture, voit ses élèves se transformer car « il a mis en route leur imaginaire. Le texte est là pour ça. La littérature est là pour ça. Pas seulement pour étalonner les connaissances des uns et des autres. Mais pour leur permettre cet acte unique chez les vivants : créer des images qui n’existent pas, n’existeront jamais qu’au secret de leur tête. ». Je n’ai qu’un conseil à vous donner : Lisez-le !!
D'autres extraits :
« Pourquoi ils viennent jamais filmer un collège quand ça va bien ? Au lieu de voir des jeunes se faire prendre pour du trafic, si on les voyait contents de faire quelque chose, peut-être que ça donnerait envie à d’autres
aussi ? »
« S’il suffisait de débiter le programme on n’aurait pas besoin de nous ! Un ordinateur fait très bien l’affaire et il peut répéter sans s’énerver cinquante fois la même chose, il suffit de cliquer ! Alors quoi, enseigner c’est être présent, c’est être vivant, c’est regarder les autres en face, pas seulement son manuel scolaire ! »
Citation :
« Enseigner, c’est apprendre deux fois. » Joseph JOUBERT (1754-1824)
Publié par Florinette
15 octobre 2006
7
15
/10
/octobre
/2006
10:24
Éditions de l’Olivier, 2000, 138 pages.
Sonia, jeune traductrice, emménage avec son mari architecte Julien - souvent parti sur les chantiers - dans un appartement qu’ils ont acheté sur un grand boulevard parisien. Elle est enceinte et assiste avec Julien à leur première réunion du syndic. C’est le moment de faire connaissance avec les habitants de l’immeuble. Sonia, dans un monologue intérieur, dresse un portrait, non dénué d’humour, sur les propriétaires qui l’entourent.
La vie suit son cours dans les étages et Sonia sympathise avec Simone, la gardienne au physique courtaud, soigneusement peroxydée et qui devient très vite de plus en plus envahissante.
Le bébé arrive et puis deux, Sonia s’apprête à vivre le bonheur parfait jusqu’au jour où Monsieur Dupotier, son voisin de palier, une personne âgée que le malheur accable, perd successivement son chien, sa femme puis son fils. Par souci d’économie, la belle-fille choisira la gardienne pour s’occuper de son beau-père, mais cette aide va vite se transformer en un véritable supplice dès que le frère de Simone entrera en scène ; séquestration et privation seront le lot quotidien du vieil homme. Sonia n’accepte pas leur façon de faire et tentera de s’interposer pour empêcher ces « bourreaux » de le maltraiter. Elle est pleine de bonnes intentions, mais très vite tout cela va se retourner contre elle. Le frère devient menaçant.
Vous aimez les histoires d’immeubles, les relations de voisinage ? alors lisez « Les bonnes intentions ». Agnès Desarthe dévoile ici les rapports qui se lient et se délient entre voisins dans une ambiance tendue avec une imagination débordante teintée de raillerie.
Le site de Agnès Desarthe
Extrait :
« Mme Dupotier avait de longs doigts maigres, crochus et crayeux. Cette dernière caractéristique s’appliquait d’ailleurs à l’ensemble de sa personne. Lorsque je la voyais sortir de chez elle, j’étais stupéfiée par sa blancheur, ce côté poussiéreux, comme si l’immeuble entier lui était tombé dessus et qu’elle s’en était miraculeusement sortie indemne, avec, pour seule séquelle, cette pellicule plâtreuse qui s’incrustait dans chaque pore de sa peau. »
Citation :
« On vit avec beaucoup de mauvaises actions sur la conscience et quelques bonnes intentions dans le cœur. » Pierre REVERDY (1889-1960)
Publié par Florinette