Éditions Actes Sud, 1988, 224 pages.
Traduit de l’américain par Christine Le Bœuf.
La fin des années 1970 est éprouvante pour Paul Auster, tout va mal dans sa vie. Son mariage avec la traductrice Lydia Davis se désintègre, l’argent commence à manquer, il ne se sent plus la force d’écrire des fictions, son roman policier écrit sous un pseudonyme reste au fond d’un tiroir et il renonce également à la poésie.
Finalement, il se sépare de sa première femme et s’installe dans une petite chambre à Manhattan au 6 Varick Street. C’est dans ce contexte dramatique que son fils Daniel fait ses premiers pas. Alors qu’il reprend espoir en terminant son premier texte en prose (White Spaces), il apprend par son oncle la disparition de son père. Poussé par une certitude qu’il doit écrire sur ce père, qu’il a très peu connu, Paul Auster se lance dans la rédaction d’un livre composé de deux parties :
« L'invention de la solitude ». Cette chambre où il s’enferme durant neuf mois, va devenir un lieu de création, de rédemption et de douleur. « Entrer dans cette chambre, c’est disparaître dans un lieu où se rencontrent le passé et le présent. »
Dans la première partie, « Portrait d’un homme invisible », il s’invente un père, parle de la douleur de l’absence et de la confrontation avec cette mort soudaine. Sa disparition lui laisse un petit héritage financier qui l’aide à poursuivre son métier d’écrivain, mais également une exploration de ses propres sentiments.
Dans la deuxième, « Le livre mémoire », Paul Auster nous entraîne dans le labyrinthe de la conscience. La solitude, la question de l’identité sous divers aspects. Le hasard, les coïncidences qui le passionnent, les signes que le destin sème sur notre route et l’importance de la mémoire.
« Tout livre est l'image d'une solitude. C'est un objet tangible, qu'on peut ramasser, déposer, ouvrir et fermer, et les mots qui le composent représentent plusieurs mois, sinon plusieurs années de la solitude d'un homme, de sorte qu'à chaque mot lu dans un livre on peut se dire confronté à une particule de cette solitude. »
C’est une lecture difficile, mais passionnante, car il permet de mieux comprendre l’œuvre de Paul Auster. Au-delà du travail sur le deuil qu’il transforme en récit, il nous ouvre les portes de son intimité, de sa solitude où il ne cesse de se poser des questions, de méditer...
« De l’examen de mon père, je suis passé à l’examen de ma propre conscience du monde. »
Citation :
« L'homme doué d'une bonne mémoire ne se souvient de rien, car il n'oublie rien. » Proust
Existe en poche
D'autres avis celui de Flo & Clarinette