« Je savais déjà que toute ma vie, je me souviendrais de cette nuit, que je garderais son empreinte sur moi, comme une cicatrice, une brûlure. Je me souviendrais des vêtements que je portais ce mercredi-là, un jean délavé, un pull kaki qui allait bien avec mes yeux, des Converse grises. Je me souviendrais de tout. Cette journée ne me quitterait jamais. »
« Je ne pouvais plus supporter l’absence de Malcom. Son lit vide. Sa chambre silencieuse. Je ressortais les vieux albums de photos, je les parcourais avec une sorte de fascination douloureuse. Voilà toute notre vie, étalée sur ces pages cartonnées, estampillée de la petite écriture ronde d’Andrew. Des dates, des lieux, des vacances, des anniversaires, des Noëls. Malcom tour à tour rieur, boudeur, hilare, rêveur, son regard bleu, sa chevelure dressée d’épis. Une absence vaste, incompréhensible. Je me retrouvais souvent roulée en boule sur le lit, à gémir comme un chien blessé. Etait-ce moi qui poussais ces cris de souffrance ? Oui, c’était moi. »
Extraits tirés du livre Moka de Tatiana de Rosnay