« Nous étions quatre dans la famille, nous sommes trois désormais. Il a fallu trouver dix hommes pour dire le kaddish. Daniel, un ami proche, les a réunis et la prière a été dite dans la langue de mes origines, un hébreu sombre et harmonieux. Je ne connais pas le sens de ces paroles, mais elles m envahissent. Le chant terminé, nous nous dirigeons vers la tombe où reposent déjà mes grands-parents. Nous jetons successivement un peu de terre. Cette cérémonie est vraiment faite pour nous, les vivants. Perla est déjà loin, là où elle a tant désiré être. Pendant ses moments de détresse, je l’ai souvent entendue murmurer : « Je veux mourir. » Ici-bas restent ses secrets, sa dépression, ses instants de beauté. »
« Qu'y a-t-il donc encore à savoir ? Je me demande pourquoi j'ai tant besoin de plonger dans son histoire. J'ai l'impression, grâce à l'écriture, de reconstruire un pont entre elle et moi. Pourtant, qu'est-ce que je connais réellement d'elle ? Perla demeure pour moi un mystère. Elle ne m'a jamais vraiment connu non plus. Nous n'avons pas assez profité l'un de l'autre, il y a eu trop de barbelés entre nous. Je me rends au Mémorial de la Shoah, à quelques pas de la chambre de service où elle habitait. Je cherche son nom. Il est bien inscrit sur la pierre. Je trouve une Perla. Je me suis trompé de mur. Ce n'est pas elle. Il y en avait eu une autre ! Qu'est-elle devenue ? A-t-elle survécu ? J'ai le cœur qui bat plus vite. Combien de Perla sont gravées sur ce marbre ? »
« Pour jouir infiniment de la vie, il faut, à chaque instant ne pas oublier la présence de la personne aimée. Lorsque l’on est imprégné de cette idée, on est prêt à affronter l’existence pour vivre l’amour dans la vie, découvrir l’amour dans la mort… »
Extraits tirés du livre Perla de Frédéric Brun