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« Oh, Grand-Mère, tu es si belle, tes mains sont si rugueuses, si âpres ! je sais que, par tes mains, tu nous raconteras l’histoire de nos montages. Grand-Mère, tu es si droite ! Grand-Mère, tu ne ris pas ; tu souris presque toujours. Quelquefois, tes yeux s’emplissent de larmes. Silencieuse, tu te déplaces partout. Souriante presque toujours, pleureuse furtivement, parfois, le soir venu. De quelles souffrances parles-tu, Grand-Mère ? »
« Je ne sais pas ce qui s’est passé à la fin de la journée. Le temps s’est de nouveau écoulé. Peut-être rencontrerai-je Jorge ce soir. Je n’ai plus de chagrin. Mais un mystère demeure : le temps. Ça traîne dans ma pensée. Le temps s’en va, il s’arrête, il m’empêchera d’arriver au niveau de Jorge. Mais je suis intelligent, comme dit Papa. Jorge est plus grand, mais j’ai le temps. C’est ça. »
« Les étoiles se sont figées, sérieuses, proches, si humaines que j’en ai éprouvé une légère frayeur. Blotti contre Grand-Père, le regard levé vers son visage, j’ai cru comprendre qu’elles allaient se taire et descendre vers nous à mesure qu’il parlerait. Solennel, les yeux plongés dans les miens, il s’est adressé à moi, presque dans un murmure. Sa main a désigné l’horizon voisin, qu’il a coupé en deux de l’index. Les montagnes ont semblé se séparer pour me faire voir l’endroit où l’apparition qu’il appelait traçait sa route. Loin, très loin, il m’a semblé voir surgir un point obscur. »
Extraits tirés du livre « La montagne ensommeillée – Contes d’une enfance andine » d'Alvaro Escobar Molina.