Dans la soirée du 4 octobre 1930, malgré une pluie cinglante et de violentes rafales de vent, le plus grand dirigeable britannique jamais construit décolle d’Angleterre pour effectuer son vol inaugural vers les Indes.
Le 5 octobre 1930, vers les 2 heures du matin, le dirigeable R101, qui devait être la plus grande fierté de l’aéronautique anglaise, s'écrase et s'enflamme sur la France, plus exactement près de la commune d’Allonne, au sud de Beauvais, dans l’Oise. Sur les 54 personnes présentes à bord, 46 périrent dans l'accident, dont le ministre anglais des Transports aériens, Lord Thomson.
Cet accident fera perdre aux Anglais la foi dans l’avenir de ce mode de transport. Il sera également l’occasion de très curieuses manifestations paranormales.
Le public apprendra la nouvelle par les journaux du matin : « Quarante-six morts dans la catastrophe du R101 » titrent-ils.
Une commission d'enquête est organisée, mais les témoignages font défaut, car, sur les 8 survivants 2 sont décédés des suites de leurs blessures, et les 6 autres travaillaient dans les coursives latérales et n’ont rien vu. On conclut donc à une soudaine perte de gaz.
Deux jours après l’explosion du R101, un témoignage peu ordinaire va cependant perturber cette affaire et dont la commission d'enquête a négligé : c’est celui du lieutenant Carmichael Irwin, lui-même décédé à son poste au cours de la catastrophe.
C’est lors d’une séance de spiritisme publique et sténographiée organisée par Harry Price avec la célèbre médium Eileen J. Garrett que ce témoignage a pu être recueilli.
Miss Eileen Garrett transmet au ministère de l’Air britannique un rapport technique extrêmement précis et détaillé sur les causes de l’accident.
Les experts qui prennent connaissance de ce rapport, n’en croient pas leurs yeux : l’abondance des détails techniques est telle, la relation des diverses phases de la catastrophe si précise, que seul un spécialiste de ce type d’appareil aurait pu les donner.
Le témoignage du lieutenant est troublant et accusateur : (extrait) « La masse totale du dirigeable était bien trop grande pour la capacité des moteurs. Les moteurs étaient bien trop lourds [...] Force ascensionnelle totale mal calculée... Système extravagant de carbone et d'hydrogène complètement stupide... Essais bien trop courts... Mauvais temps pour un long vol. L'eau stagne dessus. On penche vers l'avant. Impossible de se redresser. Impossible de s'élever...Beaucoup trop lourd....Tout était beaucoup trop lourd pour les moteurs....»
Il ne sera pas le seul à parler. D'autres personnes décédées lors de la catastrophe viendront aussi raconter les défaillances techniques. Ces témoignages auront naturellement des partisans et des contradicteurs.
Pourtant, l’enquête qui sera menée durant des mois par des experts anglais et français va démontrer que l’accident était prévisible, presque inéluctable. Il y a bien ces défauts de conception des ballons de gaz, que l’on savait poreux, et cette enveloppe extérieure gorgée d’eau par la pluie torrentielle comme l’indique le lieutenant Irwin à la médium. Et ce n’est pas tout…
Ce vol d’essai a effectivement bien été raccourci de 72 heures à 16 heures, quelques jours plus tôt, pour permettre les derniers préparatifs. Ces problèmes de surcharge, réglés dans la hâte, mais aggravés par les aménagements luxueux et lourds installés sur 2 étages pour les invités de marque.
Pour vous donner une idée, comme le précise l’historien Laurent Wattebled dans la vidéo "La Brève histoire du dirigeable R101", le dirigeable pouvait contenir en largeur 3 cathédrales de Beauvais côte à côte…
Même un fumoir à l’étage inférieur muni de briquet électrique a été installé malgré la présence, d’hydrogène hautement inflammable…
Tout, ou presque, prédestinait le R-101 à une fin tragique, mais le tapage médiatique et politique autour de ce vol inaugural était tel, plusieurs mois avant, qu’il n’était plus question de le reporter, sous peine de perdre la face...
Les graves défauts de finition du R101, soigneusement camouflés au public, auraient pu passer inaperçus sans les indications supplémentaires données par la médium qui aideront l’enquête.
Le destin tragique de dirigeable marquera la mémoire picarde, et laissera sa trace dans un champ en bordure de Beauvais.
Cet accident dramatique marquera la fin de l’aventure britannique dans cette histoire technique des aéronefs.
À Allone, la commune picarde offre au Royaume-Uni la parcelle de terrain sur laquelle s’est écrasé le dirigeable. Une stèle marque le lieu du drame.
Un monument est également érigé en bordure de la Nationale 1, au carrefour d’Allonne, à quelque 600 mètres de là.
Sources :
- Histoires extraordinaires de Guy Breton & Louis Pauwels, Albin Michel, 2012
- Extrait de la revue "Inexpliqué " volume 21, 1981
- Inexploré n°40 - Automne 2018
- Le Parisien : L’aventure du R101 s’achève dans les flammes
- Aérostèles : Lieu de mémoire aéronautique